« Qu'il agisse pour assouvir son sadisme, son idéologie, son esprit de lucre ou tout simplement parce qu'il est complètement fou, le médecin est, par son savoir et grâce au pouvoir exorbitant dont il dispose quand on se confie à lui, en bonne position pour tuer. »

~ Synopsis ~ 

Noirs Scalpels est un recueil de 20 nouvelles médicales noires. Leur genre est aléatoire. Vous pourrez lire du policier, de l'horreur, du fantastique, ou encore de la science fiction. Mais toutes les histoires se rejoignent grâce aux trois ingrédients suivants : un médecin, un instrument médical, un crime. 

Les auteurs et autrices (par ordre d'apparition) : Pierre Bordage, Frédéric H. Fajardie, Ayerdhal, Christian Lehmann, René Reouven, Martin Winckler, Joëlle Wintrebert, Michel de Pracontal, François Rivière, Jérôme Leroy, Chantal Pelletier, Lalie Walker, Claude Godfryd, Nicolas d'Estienne d'Orves, Olivier Delcroix, Daniel Walther, Chantal Montellier, Stéphanie Janicot, Marie Raspberry, Bruno Schnebert, 

Trigger Warning (TW) : violence, gore, viol, pédophilie, sexe.

~ Mon avis ~

La diversité des histoires, que ce soit au niveau des intrigues mais aussi du style d'écriture, est un point fort. La lecture n'en est que plus variée et on ne s'ennuie pas. Certaines nouvelles ont eu le mérite de me sortir de ma zone de confort, entre autre en abordant des sujets "historiques" (vers lesquels que je ne me dirige pas naturellement). De plus, quelques unes constituent, si ce n'est un bel hommage, une belle réécriture d’œuvres connues. 

Noirs Scalpels amène au questionnement de l'éthique médical, du rapport entre un médecin et ses patients, de sa capacité d'écoute, de la confiance aveugle qu'il peut susciter, et surtout de son pouvoir sur les gens.

Cette lecture fut un peu une roulette russe pour moi. 

Une partie de l'art de l'auteur ou de l'autrice est la manière de présenter ses sujets. Médecine noire oblige, Noirs Scalpels regorgent de thèmes dérangeants. Si je suis bon public, même pour des sujets glauques, ici certains de leurs traitements m'ont mise mal à l'aise. Parfois, je n'ai pas du tout accroché à la plume et au regard de l'auteur/autrice. La présence des TW est importante à prendre en compte si l'on a certaines sensibilités. 

J'ai également eu l'impression que quelques auteurs ou autrices s'imaginaient, se fantasmaient dans la médecine mais sans une connaissance (ou plutôt recherche) minime qui va avec. Ma suspension d'incrédulité n'a pas tout le temps opéré, ou des lectures - pourtant bien démarrées - ont été gâchées. Par exemple, dans l'une des nouvelles, une "crise d'allergie à l'iode" est évoquée. Sauf que... l'allergie a l'iode, ça n'existe pas. L'iode est un atome naturellement présent dans tout notre environnement et y compris dans le corps humain (par exemple dans les hormones thyroïdiennes). L'allergie à l'iode est donc un abus de langage venant des patients, mais le plus grave, des professionnels de santé. Pour comparer, certains gaz sont toxiques et peuvent se mélanger à l'air ambiant. Or si une personne est victime de l'un de ces gaz, il n'est jamais question "d'une crise d'allergie à l'air". Ça sonnerait faux... Cela peut sembler de l'ordre du détail, mais la véracité dans ces contextes précis est importante pour moi.

Néanmoins, dans l'ensemble, pas mal de nouvelles m'ont plu. Voire même j'en ai adoré quelques unes, qui sont de vraies pépites.

Le Second Scalpel, de Frédéric H. Fajardie, se passent au 19ème siècle en pleine bataille d'Eylau. Sur le champ de guerre, le ressenti du personnage principal devient particulièrement communicatif, et l' "arme du crime" est juste brillante. Vincent Moranne, réanimateur, de Christian Lehmann, offre un regard très original sur la hiérarchie médical et surtout le pouvoir de vie et de mort que possède les médecins. La dernière aventure, de Martin Winckler, est une belle histoire de fin de vie et fait honneur à d'illustres personnages. Bombe Chelle, de Marie Raspberry, propose une enquête passionnante au dénouement surprenant. Enfin, Bienvenue au club, de Bruno Schnebert - la dernière nouvelle du recueil - m'a d’abord provoqué quelques rires ... puis j'ai été littéralement scotchée par sa chute . Cette lecture m'a laissé un arrière goût sur fond d'humour noir délicieux pour clôturer le livre. Et c'était parfait